[ Not to be ]

6 juillet 2009

J'avais dis que je n'écrirais plus.

Les premières choses qui vous échappent sont votre voix et votre équilibre. Votre voix, elle se met parfois à trembler, pourtant vous restez naturel et vous conversez de tout et de rien avec les gens comme vous le faisiez la veille. Votre équilibre déconne, vous trébuchez souvent en marchant, vos mouvements sont plus saccadés que d'habitude. Il arrive que le filtre tombe par terre lorsque vous tentez de rouler une clope. Tout ça ne transparait pas dans le regard des autres, il n'y a que vous pour le voir réellement. C'est une question d'instinct et d'orgueil je suppose. Vous ne devez pas avoir l'air d'aller mal et d'ailleurs vous allez trés bien, vos sourires sont sincères et la vie continue. Quand vous êtes seul et seulement à ce moment là, une ombre immense vient s'emparer de vous et vous avez un apperçu de ce que vivent les gens qui sont hospitalisé à la prison des anges. La mort et la folie travaillant en équipe je suppose que c'est légitime.

A 13h j'étais sur la nationale et je tendais le pouce, seule avec mon sac-à-dos, ma main gauche tripotant mon collier de perles. Je n'avais jamais envisagé que tu puisse mourir et maintenant quand je regarde le ciel je n'arrive plus vraiment à croire ce qu'il me raconte. Une voiture s'arrête et c'est un chef d'entreprise qui m'explique que ça n'a pas été un plaisir de licencier ses employés, qu'il est quelqu'un de bien, qu'il n'avait pas le choix, que lui aussi il a des rêves. Un poid-lourd s'arrête et le gros bonhomme barbu m'explique que lui son truc c'était ça, la route qui se faisait bouffer par le rétro, il avait toujours trouvé ça trés beau. Mais aujourd'hui dans le pays dans lequel on vit, avec la conjoncture actuelle, la crise, toutes ces choses, non ça n'était plus un rêve. C'était devenu le combat ordinaire et douloureux d'une vie et d'une société. Routier depuis dix ans et plus rien qui brille au plafond. Une autre voiture s'arrête et le type explique qu'il a fait l'armée. Parait que sur la côte d'Ivoir un gamin défoncé de douze ans sait se servir d'une mitraillette mieux qu'un officier punaisé de médailles. Est-ce qu'on peut fumer dans votre voiture? Non, la mort de Mickaël Jackson ne me touche pas vraiment. A 18h j'étais arrivé à destination et j'avais un sourire tellement réel que je m'en serais presque voulu.

Vous n'êtes pas d'accord avec l'idée selon laquelle on devrait continuer de vivre. La machine compliquée du corps et du crâne se met en marche et s'active dans des automatismes effrayants. Vous avez envie de vous foutre des claques. C'est tout? Est-ce que je ne devrais pas mourir moi aussi? Au moins de chagrin. Rien ne serait moins normal et pourtant c'est tout le contraire. Le soleil se couche et se lève. J'entends la voix de Barbe Noire qui dit "Bonjour" et je trouve un charme particulier à ses tous premiers sourires entourés de sommeil. Ses doigts analysent distraitement l'ossature et la construction de ma colone vertebrale, il voudrait savoir dessiner le corps humain dans son exactitude la plus complexe. Il existe un instant quand on vient de se reveiller ou personne n'est jamais mort. Il existe parmis les écorchés deux morceaux de chair et de rêves tellement incandescents que j'aurais peur de les brûler en voulant les décrire. Une chose reste certaine : Il y a des morsures qui ne s'effacent pas. Je bave sur l'oreiller, je me coule dans un bain de lave en sourires et sueur. C'est vrai que c'est un joli mot.

Alors vous faites la vie.

J'avais dis que je n'écrirais plus.

Posté par salefee à 19:23 - Commentaires […] - Permalien [#]